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Calcul des propositions |
Le calcul propositionnel (sporadiquement appelé logique d’ordre zéro) est une théorie formelle (au sens où il s’agit de manipuler des formules) qui modélise des raisonnements mathématiques simples du type “si A alors B”.
Le [Calcul des prédicats](Calcul des prédicats) constitue une généralisation du calcul des propositions à des formules plus complexes du type “pour tout n, si n a la propriété X alors n a la propriété Y”.
Une proposition est une phrase dont on peut affirmer qu’elle est vraie ou fausse. Ainsi “il pleut”, “$$n$$ est pair”, “$$n>0$$” sont des propositions, mais “le nombre de doigts de la main”, “4”, “$$f(n)$$” ne le sont pas.
Le calcul des propositions modélise la façon dont le mathématicien raisonne sur la vérité et la fausseté en faisant abstraction des propositions spécifiques qui forment le raisonnement concret. Ce qui compte est exclusivement la forme du raisonnement, ainsi l’affirmation
S’il pleut ou il neige, alors il y a des nuages
et l’affirmation
Si
$$n > 0$$ ou$$n < 0$$ , alors$$n\ne0$$
sont représentées par la même formule
Si A ou B, alors C
où les variables A, B, C représentent à la fois les propositions "il pleut", "il neige", "$$n > 0$$", etc.
De plus, les connecteurs logiques si, alors, ou, etc. sont exprimés par des symboles plutôt que par des mots. Par convention, on utilise les symboles suivants:
|-------------------- |------------------------------------------------------------
Formule | Interprétation |
---|---|
si |
|
|
|
|
|
|
|
il n'est pas vrai que |
|
-------------------- | ------------------------------------------------------------- |
De tous les opérateurs, seul le "ou" mérite quelques mots
d'explication en plus. Par
Type de ou | Notation | Exemple |
---|---|---|
ou inclusif | j'y vais, ou bien on y va ensemble | |
ou exclusif | tu manges le potage ou tu vas te coucher immédiatement! | |
----------- | ----------- | ------------------------------------------------------- |
En calcul des propositions, comme dans tout autre système formel, on fait une distinction minutieuse entre syntaxe, sémantique et métalogique. Ainsi, la syntaxe décrit la façon correcte de former les formules, la sémantique donne l’interprétation des formules, et la métalogique est le processus de raisonner sur le système formel avec des outils externes (la pensée mathématique, en général, ou plus formellement une autre logique formelle plus puissante que le calcul des propositions).
La syntaxe du calcul propositionnel est composée des éléments suivants:
- Une liste infinie (mais dénombrable) de
propositions atomiques (ou formules atomiques), en général
représentées par les lettres de l'alphabet
$$A, B, \ldots$$ , - Des opérateurs logiques, en général
$$\wedge, \vee, \to, \neg$$ .
Une proposition (ou formule, ou formule bien formée) est
- soit une proposition atomique,
- soit le résultat de la combinaison d'un opérateur logique avec deux
(ou une dans le cas de
$$\neg$$ ) propositions (non nécessairement atomiques).
Ainsi
Remarque: les parenthèses ne font pas partie du calcul des propositions, elles sont simplement là pour décrire la structure syntaxique des formules, i.e. pour indiquer dans quel ordre les opérateurs ont été appliqués pour obtenir la formule. Voir [du bon usage des parenthèses](Logique mathématique#du-bon-usage-des-parenthèses).
Pour réduire le nombre de parenthèses, on assigne une précédence par
défaut aux opérateurs. Ainsi
doit être lue comme
Puisque on peut démontrer que
peut être aussi bien interprété comme
que comme
ce qui ne change rien dans un contexte où l’on s’intéresse à la vérité de la formule puisque ces deux formules sont sémantiquement équivalentes. Cependant, nous allons essayer d’utiliser cette convention le moins possible.
Attention: Par contre, il est toujours incorrect d’écrire
puisque les deux parenthésages possibles de la formule n’ont pas la même
sémantique (remarquez que certains auteurs préfèrent assigner une priorité plus haute à
est ambiguë puisque les deux parenthésages ne sont pas équivalents. Beaucoup de textes adoptent la convention de l’associativité à droite, ainsi la seule lecture possible de la formule ci-dessus serait
mais remarquez que ceci est purement une convention, que nous allons éviter d’utiliser dans ce texte.
La sémantique consiste à attacher des interprétations aux formules du calcul propositionnel. Le système qui est obtenu en considérant toutes les interprétations possibles est aussi appelée logique Boléenne ou algèbre de Boole.
Formellement, un modèle (parfois on dit une interprétation)
d’une proposition est l’affectation d’une valeur
On parle aussi de modèle du calcul propositionnel lorsque on assigne une valeur de vérité à chacune de ses propositions atomiques (souvenez-vous qu’il y en a une infinité).
Un modèle d’une formule
- Si
$$\phi = A$$ pour une formule atomique$$A$$ , alors la valeur de vérité de$$\phi$$ est la valeur de vérité de$$A$$ ; - Si
$$\phi = \neg\psi$$ pour une formule$$\psi$$ , alors$$\phi$$ vaut$$1$$ si et seulement si$$\psi$$ vaut$$0$$ ; - Si
$$\phi = \psi \wedge \chi$$ pour deux formules$$\psi$$ et$$\chi$$ , alors$$\phi$$ vaut$$1$$ si et seulement si$$\psi$$ et$$\chi$$ valent$$1$$ ; - Si
$$\phi = \psi \vee \chi$$ pour deux formules$$\psi$$ et$$\chi$$ , alors$$\phi$$ vaut$$0$$ si et seulement si$$\psi$$ et$$\chi$$ valent$$0$$ ; - Si
$$\phi = \psi \to \chi$$ pour deux formules$$\psi$$ et$$\chi$$ , alors$$\phi$$ vaut$$0$$ si et seulement si$$\psi$$ vaut$$1$$ et$$\chi$$ vaut$$0$$ .
Les quatre dernières règles peuvent être résumées de façon très simple par la méthode familière des tableaux de vérité:
0 | 1 |
1 | 0 |
0 | 0 | 0 |
0 | 1 | 0 |
1 | 0 | 0 |
1 | 1 | 1 |
0 | 0 | 0 |
0 | 1 | 1 |
1 | 0 | 1 |
1 | 1 | 1 |
0 | 0 | 1 |
0 | 1 | 1 |
1 | 0 | 0 |
1 | 1 | 1 |
Remarque: Dans ce qui précède nous avons utilisé des lettres
grecques
Si un modèle
- satisfaisable s’il existe un modèle qui la rend vraie;
- une tautologie si elle est vraie dans tout modèle (on dit aussi que la formule est valide);
- falsifiable s’il existe un modèle qui la rend fausse;
- une antilogie s’il n’existe aucun modèle qui la rend vraie.
Par example
La notion de vérité est une notion purement sémantique. On a déjà
discuté de la notion de tautologie, introduisons maintenant un peu de
notation. Soit
signifie que
intuitivement, ceci signifie que
Lorsque on a
Pour donner un exemple, il suffit de regarder les tables de vérité pour
se rendre compte que
Attention: aucun des symboles
Voici une liste de formules qui peuvent être prouvées sémantiquement
équivalentes en comparant leur tables de vérité (remarquez qu’à la
place de
|Propriété | Formules équivalentes |-|:-:|:-: |Double négation |$$A$$ |$$\neg\neg A$$ |Commutativité |$$A\wedge B$$ |$$B\wedge A$$ | |$$A\vee B$$ |$$B\vee A$$ |Associativité |$$(A\wedge B)\wedge C$$ |$$A\wedge(B\wedge C)$$ | |$$(A\vee B)\vee C$$ |$$A\vee(B\vee C)$$ |Distributivité |$$A\wedge(B\vee C)$$ |$$(A\wedge B)\vee(B\wedge C)$$ | |$$A\vee(B\wedge C)$$ |$$(A\vee B)\wedge(B\vee C)$$ |Lois de de Morgan |$$\neg(A\wedge B)$$ |$$\neg A\vee\neg B$$ | |$$\neg(A\vee B)$$ |$$\neg A\wedge\neg B$$ |Implication |$$A\to B$$ |$$\neg A \vee B$$ |Transposition |$$A\to B$$ |$$\neg B \to \neg A$$ |Exportation |$$(A \wedge B) \to C$$ |$$A \to (B \to C)$$
Exercice: écrivez les tables de vérité des formules ci-dessus et vérifiez qu’elles sont effectivement équivalentes.
On appelle implication matérielle le connecteur logique
Ce métathéorème, appelé théorème de déduction, constitue la justification sémantique du raisonnement hypothétique qu’on va définir plus tard.
La [Théorie de la preuve](Théorie de la preuve#calcul-des-propositions) est une approche complémentaire à la théorie des modèles. Si les notions de modèle et de vérité permettent de vérifier aisément (et en temps fini) si une formule donnée est valide ou pas, la théorie de la preuve essaye de modéliser de plus près la façon dont le mathématicien pense et démontre des théorèmes.
Le vrai intérêt de la théorie de la preuve réside, cependant dans son application à la [logique du premier ordre](Calcul des prédicats). Voir [Théorie de la preuve](Théorie de la preuve).
Pour les définitions de base et les algèbres de Boole, on pourra consulter un quelconque des ouvrages conseillés dans la Bibliographie.
Pour une exposition claire et complète sur la distinction entre syntaxe
et sémantique et sur la théorie de la preuve, je conseille les chapitres
4 et 5 du livre Mathématiques pour l’Informatique de Arnold et
Guessarian, en particulier la section 5.2: à quelques choix de
nomenclature et de notation près (par exemple le symbole
Introduction à la logique de David, Nour et Raffali est un autre très bon texte. Le chapitre 1 couvre toute la théorie de la preuve faite dans ce cours, plus la théorie de la preuve du [Calcul des Prédicats](Calcul des prédicats). Il propose aussi beaucoup d’exercices pour vous entraîner avec les séquents. Le chapitre 2 couvre la sémantique et les théorèmes de complétude. L’étudiant intéressé pourra les lire rapidement.
Allez voir aussi les pages des Exercices et des [Exercices Corrigés](Exercices Corrigés).